Nous avons tous tué Charlie
La France pleure aujourd'hui la mort de certains de ses meilleurs dessinateurs de presse, de chroniqueurs talentueux, à l'esprit et la plume acérés...
En sortant dans la rue, à la suite de leur carnage, les "connards" (comme l'a si bien dit Plantu hier) ont crié "On a tué Charlie!"
Ils ont raison : on a tué Charlie... On a tous tué Charlie !
Nous, la majorité silencieuse, qui a pris l'habitude de ne plus se révolter, s'indigner, ou ne serait-ce que s'agacer.
Qui a pris l'habitude de "faire avec", dans notre société où on ne dit plus un mot plus haut que l'autre. Où les "handicapés" sont devenus des "personnes à mobilité réduite", les "aveugles" des "non-voyants", les "sourds" des "malentendants", et les "escrocs" des "présumés innocents"...
A Charlie, les enculés ont toujours été des enculés !
A Charlie, l'humour et la dérision ont toujours guidé les journalistes, mais leurs dessins et leurs chroniques allaient bien plus loin qu'un peu d'humour et et de satire.
Dessin après dessin, journal après journal, ils dénonçaient notre apathie, notre laisser-aller dans la torpeur générale. Ils prônaient l'amour plutôt que la haine, mais sans jamais oublier de dénoncer les travers de notre société : l'argent roi, le poids des religions - de toutes les religions -, la montée du fondamentalisme islamique, que nos média relativisent par crainte de l'amalgame.
On nous prend pour des cons, pensant que pointer du doigt les islamistes radicaux va stigmatiser tous les musulmans, de France et d'ailleurs... Du coup, à répéter sans cesse qu'il ne faut pas faire d'amalgame entre extrémistes islamiques et musulmans... Les gens sont tentés de faire l'amalgame... C'est bête, un être humain...
Mais au-delà de l'Islam et de ses intégristes, la question concerne surtout notre capacité à nous indigner.
J'ai été émue par cette vague de colère qui a jeté tous ces gens dans la rue hier pour dire leur indignation et leur refus de la terreur.
Nous sommes touchés parce que cela arrive chez nous violemment, au grand jour, que nous sentons brusquement, et de la façon la plus cruelle qui soit, à quel point notre liberté d'expression est menacée. Nous nous rappelons l'importance d'une presse libre et indépendante...
Mais nous aurions dû descendre dans la rue quand les islamistes ont décapité les journalistes américains qui ont eu le courage d'aller sur place.
Quand Camille Lepage a été assassinée en Centrafrique pour avoir osé aller couvrir un conflit dont personne ne parlait.
Nous aurions déjà dû descendre après le premier attentat contre les locaux de Charlie en 2012.
Où étions-nous ?
Où sommes-nous, lorsque nous, journalistes locaux ou nationaux, nous acceptons d'édulcorer ou de supprimer un sujet sous les pressions des politiques, des annonceurs ou des lobbies divers et variés?
Charlie Hebdo a payé cher toutes nos petits lâchetés quotidiennes.
Ne nous trompons pas : nous avons tous tué Charlie hier, il ne tient qu'à nous de le faire vivre demain !
En sortant dans la rue, à la suite de leur carnage, les "connards" (comme l'a si bien dit Plantu hier) ont crié "On a tué Charlie!"
Ils ont raison : on a tué Charlie... On a tous tué Charlie !
Nous, la majorité silencieuse, qui a pris l'habitude de ne plus se révolter, s'indigner, ou ne serait-ce que s'agacer.
Qui a pris l'habitude de "faire avec", dans notre société où on ne dit plus un mot plus haut que l'autre. Où les "handicapés" sont devenus des "personnes à mobilité réduite", les "aveugles" des "non-voyants", les "sourds" des "malentendants", et les "escrocs" des "présumés innocents"...
A Charlie, les enculés ont toujours été des enculés !
A Charlie, l'humour et la dérision ont toujours guidé les journalistes, mais leurs dessins et leurs chroniques allaient bien plus loin qu'un peu d'humour et et de satire.
Dessin après dessin, journal après journal, ils dénonçaient notre apathie, notre laisser-aller dans la torpeur générale. Ils prônaient l'amour plutôt que la haine, mais sans jamais oublier de dénoncer les travers de notre société : l'argent roi, le poids des religions - de toutes les religions -, la montée du fondamentalisme islamique, que nos média relativisent par crainte de l'amalgame.
On nous prend pour des cons, pensant que pointer du doigt les islamistes radicaux va stigmatiser tous les musulmans, de France et d'ailleurs... Du coup, à répéter sans cesse qu'il ne faut pas faire d'amalgame entre extrémistes islamiques et musulmans... Les gens sont tentés de faire l'amalgame... C'est bête, un être humain...
Mais au-delà de l'Islam et de ses intégristes, la question concerne surtout notre capacité à nous indigner.
J'ai été émue par cette vague de colère qui a jeté tous ces gens dans la rue hier pour dire leur indignation et leur refus de la terreur.
Nous sommes touchés parce que cela arrive chez nous violemment, au grand jour, que nous sentons brusquement, et de la façon la plus cruelle qui soit, à quel point notre liberté d'expression est menacée. Nous nous rappelons l'importance d'une presse libre et indépendante...
Mais nous aurions dû descendre dans la rue quand les islamistes ont décapité les journalistes américains qui ont eu le courage d'aller sur place.
Quand Camille Lepage a été assassinée en Centrafrique pour avoir osé aller couvrir un conflit dont personne ne parlait.
Nous aurions déjà dû descendre après le premier attentat contre les locaux de Charlie en 2012.
Où étions-nous ?
Où sommes-nous, lorsque nous, journalistes locaux ou nationaux, nous acceptons d'édulcorer ou de supprimer un sujet sous les pressions des politiques, des annonceurs ou des lobbies divers et variés?
Charlie Hebdo a payé cher toutes nos petits lâchetés quotidiennes.
Ne nous trompons pas : nous avons tous tué Charlie hier, il ne tient qu'à nous de le faire vivre demain !
Meilleurs vœux charmante Delphine, à la plume acérée et libre. Je suis fan et tu devrais étendre tes écrits à d'autres domaines de la lutte.
RépondreSupprimerHier, j'étais assommé comme des millions d'entre nous (mon collègue d'à côté était paniqué à l'idée qu'une de ses copines qui fréquentait souvent Charlie faisait peut-être partie du lot.
Sur les Terreaux on avait l'air fin avec nos papillons je suis Charlie, à se serrer/serrer/serrer les coudes, dans cette société frileuse et pétocharde où l'on passe notre temps à éviter l'autre, et les coudes, de ceux qui nous marchent sur les pieds, ou nous crachent à la gueule, dès qu'on est un peu différent du troupeau des âmes bêlantes du net.
La guerre est déclarée et j'en veux beaucoup à nos amis (?) socialistes qui n'ont pas su prendre en compte le cul de sac des banlieues (repeindre les cages d'escalier c'est bien, mais ça ne construit pas un avenir commun) remettre en marche l'ascenseur social, ou encore procurer une vraie place à ceux qui nous font l'honneur de choisir la France comme patrie.
Je t'aime toujours.
Bonne année 2015, pleine de post talentueux dont tu as le secret.
Merci Delphine pour cet écrit qui nous réveille les méninges ... merci infiniment ...
RépondreSupprimerSuperbement dit James blonde.
RépondreSupprimerBien vu Delphine. Ta plume est toujours aussi acérée.
RépondreSupprimerBises
c est bien envoyé. Peut être un peu trop gentil (mais vu que c'est moi qui l'écris, faut beaucoup relativiser !)
RépondreSupprimerTon article est parfait. Je t'embrasse bien fort !
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