La collectivité - Épisode 18 : Une nouvelle ère

Ca y est ! Le directeur de DeF est parti à la retraite. Son pot de départ a été un grand moment d’émotion. Toute la direction était réunie, et a eu droit aux discours avec des trémolos dans la voix et les yeux embués du vice-président et du directeur adjoint : « Ah, quelle tristesse ! Un homme de grande valeur ! Aux qualités humaines irréprochables ! Que j’ai d’ailleurs pris soin de m’approprier » (Vous avez noté la subtilité du discours ? On parle de l’autre, mais on parle de soi ! On flatte, on ne cite que les qualités, et on se targue d’avoir les mêmes. Ni vu, ni connu, je t’embrouille ! Pourrait être candidat à la présidentielle, celui-là !) Ca vaut le coup de partir à la retraite, finalement ! On devient d’un coup irréprochable, irremplaçable, bref… Il faudrait partir en retraite chaque vendredi, et faire son come-back le lundi suivant (Ben quoi, y’a bien des chanteurs tout pourris qui font ça régulièrement !).

Enfin bref, après terrines maison et champagne dans des gobelets en plastique, le directeur de DeF est parti avec des bons voyage et une bande dessinée sur laquelle le service planchait depuis 2 mois (vous voyez qu’on bosse !), laissant derrière lui une direction effondrée, et surtout à moitié bourrée (si, si : quand on essaie de sortir d’une salle et qu’on se cogne au chambranle, promis, c’est qu’on est pété !). L’après-midi a donc été très calme, entre cafés pour dessaouler et rappel de bons souvenirs avec les yeux qui se mouillent. Mais rendons à César ce qui est à César, il est vrai que le directeur était très humain et très compréhensif (autrement dit, il laissait faire tout comme on voulait !) et aussi très drôle. Ce qui n’a pas manqué d’être souligné à chaque fois dans les discours élogieux qui lui ont été adressés. Et, bizarrement, le chef de service de DeF (pas l’homme le plus drôle du monde qui soit, entre nous), qui candidate pour le poste de directeur, s’est mis à raconter des blagues et sortir de bons mots. Il rit même aux blagues des autres. Mais de là à penser que cette subite arrivée d’humour est calculée… Quel cynisme ! Pourquoi les gens aujourd’hui ne croient-ils plus à la franchise ? Pourquoi, dans quelques semaines, n’aurait-il pas lui aussi la légitimité de pourvoir dire : « Quelle bravitude ! J’ai changé ! » ? Que les gens sont mauvaises langues !

DeF saura-t-elle se méfier des fourbes avides de pouvoir dans sa direction ?
Saura-t-elle éblouir son nouveau directeur par ses idées exceptionnelles ?
Et pourquoi est-il formellement interdit de s’entraîner à la plongée sous-marine
dans le bassin du bâtiment principal ?